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至少我不會錯過描寫人,不是寫他的個子高矮而是年歲長短,描寫他在移動時不得不隨身拖曳著的年歲,最終將把他壓垮
2012/11/08 05:32:55瀏覽283|回應0|推薦5
當然,我們的感官還有很多別的謬誤,這些謬誤扭曲了這個世界呈現在我們面前的真實面貌,我們已經看到,在這篇敍述文字中有不少片段爲我證實了這一點。然而,必要的時候,在我儘量做到比較確切的描摹中,我還可以不改變聲音的位置,克制自己,不把它們與它們的起因分開,與這個起因相比,智力是事後確定這些聲音的位置的,雖然說讓我們在房間裡聽淅淅瀝瀝的雨聲和讓它在院子裡滂沱,藥茶的沸騰,總之不會像畫家們經常做的事更令人因惑不解(畫家們在離我們很近或很遠的地方作畫,按照透視法則、顔色強度和目光的第一錯覺使物體顯現的情況,繪出繼爾被推理作了有時是極大的距離移動的一張風帆或一道山峰)。我還能像人們所做的那樣,儘管謬誤會更加嚴重,繼續在一位過路女人的面容上勾畫線條,只是在該畫鼻子、臉頰和下巴的地方應當留著空白,好讓我們欲望的反映在這片空白上一顯身手。即使我沒有時間爲同一張臉準備一百個適合它戴的面具(做這件重要得多的事情),哪怕只是依據這雙看到這張臉的眼睛,依據它們看到這副面容時的感覺,以及,對這雙眼睛而言,哪怕只是依據三十年間掩蓋著年齡變化的或希望、或恐懼、或相反的愛情和習慣來做這一百個面具;甚至(這是我和阿爾貝蒂娜的關係便足以爲我說明了的,沒有它則一切都是假的和騙人的),即使我不著手進行,不是從我們的外表而是從我們的內心、從某些人的一舉一動便能掀起致我們於死地的軒然大波的地方去描繪她們,並且也不去根據我們不同的感覺壓力,或者當普普通通的一絲險情擾亂了我們平靜的信念,把一個在寧靜中是那麽微不足道的東西數倍數倍地擴大的時候改變精神天國的光線;如果說在描摹一個需要完全重繪的世界中我不可能道盡這些和其他許多變化的話(其必要性,倘使我們想要描繪現實的話,在這篇敍述文字裡說得算是夠清楚了),那麽,至少我不會錯過描寫人,不是寫他的個子高矮,而是寫他的年歲長短,描寫他在移動位置時不得不隨身拖曳著的年歲,它仿佛是越來越沈重的擔子,最終將把他壓垮。
(p.379 追憶似水年華 VII 重現的時光 聯經版 1992)

Certainly, our senses lead us into other errors, many episodes in this narrative had proved to me that they falsify the real aspect of life. But I might, if it were needful, to secure the more accurate interpretation I proposed, be able to leave the locality of sounds unchanged, to refrain from detaching them from the source the intelligence assigns to them, although making the rain patter in one’s room or fall in torrents into the cup from which we are drinking is, in itself, no more disconcerting than when as they often have, artists paint a sail or a peak near to or far away from us, according as the laws of perspective, variation in colour and ocular illusion make them appear, while our reason tells us that these objects are situated at enormous distances from us. I might, although the error would be more serious, continue the fashion of putting features into the face of a passing woman, when instead of nose and cheeks and chin there was nothing there but an empty space in which our desire was reflected. And, a far more important matter, if I had not the leisure to prepare the hundred masks suitable to a single face, were it only as the eyes see it and in the sense in which they read its features, according as those eyes hope or fear or, on the other hand, as love and habit which conceal changes of age for many years, see them, indeed, even if I did not undertake, in spite of my liaison with Albertine proving that without it everything is fictitious and false, to represent people not from outside but from within ourselves where their smallest acts may entail fatal consequences, and to vary the moral atmosphere according to the different impressions on our sensibility or according to our serene sureness that an object is insignificant whereas the mere shadow of danger multiplies its size in a moment, if I could not introduce these changes and many others (the need for which, if one means to portray the truth has constantly been shown in the course of this narrative) into the transcription of a universe which had to be completely redesigned, at all events I should not fail to depict therein man, as having the extension, not of his body but of his years, as being forced to the cumulatively heavy task which finally crushes him, of dragging them with him wherever he goes.
(Translated by Stephen Hudson)

Certes, il est bien d’autres erreurs de nos sens – on a vu que divers épisodes de ce récit me l’avaient prouvé – qui faussent pour nous l’aspect réel de ce monde. Mais enfin, je pourrais, à la rigueur, dans la transcription plus exacte que je m’efforcerais de donner, ne pas changer la place des sons, m’abstenir de les détacher de leur cause, à côté de laquelle l’intelligence les situe après coup, bien que faire chanter la pluie au milieu de la chambre et tomber en déluge dans la cour l’ébullition de notre tisane ne doit pas être, en somme, plus déconcertant que ce qu’ont fait si souvent les peintres quand ils peignent, très près ou très loin de nous, selon que les lois de la perspective, l’intensité des couleurs et la première illusion du regard nous les font apparaître, une voile ou un pic que le raisonnement déplacera ensuite de distances quelquefois énormes. Je pourrais, bien que l’erreur soit plus grave, continuer, comme on fait, à mettre des traits dans le visage d’une passante, alors qu’à la place du nez, des joues et du menton, il ne devrait y avoir qu’un espace vide sur lequel jouerait tout au plus le reflet de nos désirs. Et même, si je n’avais pas le loisir de préparer, chose déjà bien plus importante, les cent masques qu’il convient d’attacher à un même visage, ne fût-ce que selon les yeux qui le voient et le sens où ils en lisent les traits et, pour les mêmes yeux, selon l’espérance ou la crainte, ou au contraire l’amour et l’habitude qui cachent pendant tant d’années les changements de l’âge, même enfin si je n’entreprenais pas, ce dont ma liaison avec Albertine suffisait pourtant à me montrer que sans cela tout est factice et mensonger, de représenter certaines personnes non pas au dehors, mais en dedans de nous où leurs moindres actes peuvent amener des troubles mortels, et de faire varier aussi la lumière du ciel moral selon les différences de pression de notre sensibilité ou selon la sérénité de notre certitude, sous laquelle un objet est si petit alors qu’un simple nuage de risque en multiplie en un moment la grandeur, si je ne pouvais apporter ces changements et bien d’autres (dont la nécessité, si on veut peindre le réel, a pu apparaître au cours de ce récit) dans la transcription d’un univers qui était à redessiner tout entier, du moins ne manquerais-je pas avant toute chose d’y décrire l’homme comme ayant la longueur non de son corps mais de ses années, comme devant, tâche de plus en plus énorme et qui finit par le vaincre, les traîner avec lui quand il se déplace.

(l’édition Gallimard, Paris, 1946-47 )
( 知識學習隨堂筆記 )
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